Yves Montigny : « Il faut prendre conscience que Baie-Comeau change »

25 octobre 2017
Temps de lecture :

Âge : 46 ans

État civil : Conjoint de fait

Formation : Baccalauréat en enseignement

Carrière : Conseiller pédagogique à la Commission scolaire de l’Estuaire

Votre premier geste une fois assermenté?

Annoncer clairement que la Ville de Baie-Comeau se place en mode développement économique. On a géré la décroissance pendant trop d’années, il faut vraiment se placer en mode croissance. Baie-Comeau doit se donner un plan directeur. On n’a pas de vision à long terme. On gère tout à la petite semaine. Un plan de développement, un plan stratégique et une vision de développement économique, c’est urgent. Il y a Shawinigan qui l’a fait. Il y a Chapais qui l’a fait. Ils ont commencé ça à la fin des années 2000 et ils sont déjà en train de gérer de la croissance. Ils ont une région similaire à la nôtre : forêt et énergie. On a ça nous aussi.

Le projet qui vous tient le plus à cœur?

La revitalisation du secteur du Plateau. Ça va générer de la vitalité économique. On le travaille depuis quelque temps. Ce n’est pas quelque chose de nouveau qui arrive en campagne. C’est quelque chose déjà à l’étude. Le dossier est fait. Il y a là vraiment un élément très important pour redynamiser notre ville.

Dans l’avenir, plus ou moins de services municipaux?

Différents. Il faut prendre conscience que le monde a changé, que Baie-Comeau change. Il y a une décroissance de la population, mais il faut travailler en croissance. Si on continue à gérer de la décroissance, on va se mettre à fermer des services, mais ce n’est pas ça qu’on veut faire. Ça ne veut pas dire qu’il faut se mettre à dépenser en fou. J’ai présenté mon cadre financier, j’ai dit qu’il faut réussir à baisser la dette municipale et pour réussir, il y a deux possibilités : ou on coupe dans les services, ou on assure des revenus additionnels. Les services, il faut les penser différemment et impliquer davantage les utilisateurs, comme avec le lac Malfait (l’association) ou le dekhockey.

Que faire pour inverser le déclin démographique?

Ceux qui me disent que ça ne se peut pas, ils vont se donner comme modèle Résolu. Ceux me disent que ça se peut, ils vont se donner l’exemple du cégep de Baie-Comeau. Quand j’ai entendu M. Garneau (grand patron de Résolu) au Manoir dire que bientôt l’usine allait fermer, le message qu’il a lancé c’est n’appliquez pas chez nous, il se peut qu’on ferme. L’autre choix, c’est ce que le cégep a fait. Malgré des prévisions de décroissance épouvantables, il a dit non, moi je n’embarque pas là-dedans et je fais ça différemment. Il faut laisser de côté cette vision où on ne fait que de la gestion de la décroissance et que si ça continue, on va fermer, comme Résolu fait. Il faut prendre l’autre vision et c’est ce qu’un maire peut faire.

Comment ramener Baie-Comeau sur la voie de la prospérité durant votre mandat?

On a encore besoin de surveiller attentivement nos finances pour être capable de dégager des marges de manœuvre pour faire du développement. La création de gouvernements de proximité, c’est pas juste des mots creux. Ça nous donne des leviers dans le monde municipal pour prendre des décisions, entre autres pour soutenir les entrepreneurs. Malheureusement, actuellement, dans le cadre administratif actuel, on dit des fois à des entrepreneurs, non, tu ne feras pas ton projet d’expansion. Ça, ça me dépasse. Il faut qu’ils viennent à la séance du conseil pour réussir à avancer leur projet. C’est des freins, vraiment des freins au développement économique de Baie-Comeau. La Société d’expansion, son mandat est canné depuis des années. On peux-tu se demander si ça marche, si ça marche à son plein potentiel? La réponse est non. Je veux revoir entre autres le rôle de la Société d’expansion et ça commence par sa gouvernance.

Comment créer un sentiment d’appartenance chez les citoyens?

Ça va être un peu raide, mais quand t’as des gens qui se présentent en politique et qui dénigrent le Jardin des glaciers, les croisières…, ça je ne suis plus capable. Il faut qu’on apprenne à aimer ce que nous sommes. Moi, je l’ai dans le cœur Baie-Comeau et c’est pour ça que je fais de la politique. C’est pour ça que j’ai choisi Baie-Comeau plein de fois, car j’avais d’autres opportunités de carrière. Les leaders ne sont pas capables de verbaliser comment ils l’aiment leur ville. Ce n’est pas vrai qu’il n’y rien à faire à Baie-Comeau. Il n’y a rien à faire si tu restes chez vous. Quand on a été dans un discours de morosité pendant plusieurs années, ça fait ça, les gens n’ont plus ce petit attachement-là. Quand le sel ne goute plus le sel, ça donne plus rien d’en avoir. C’est comme si on avait fait ça avec nos installations.

Baie-Comeau est-elle encore trop dépendante de la grande entreprise?

Oui. On ne s’est pas donné clairement, à l’intérieur de la Ville, des ressources qui travaillent au développement de la PME. J’ai élaboré le début, l’ébauche d’un plan de développement économique. Ce n’est pas Yves Montigny qui va le faire tout seul, mais on ne part pas d’une page blanche. Avant, la grande industrie nous amenait du monde, mais ce n’est plus ça. Aujourd’hui, il y a des emplois affichés chez Résolu, à la commission scolaire et en santé. On a besoin de main-d’œuvre à Baie-Comeau, mais on ne se fait pas valoir. II faut se prendre en main et dire on va aller chercher du monde pour combler les emplois qu’on a sur le territoire. Ça prend quelqu’un qui va leader le plan de développement économique.

À part hausser les taxes, que peut faire un maire pour augmenter les revenus de la municipalité?

Il y a d’autres leviers. À Baie-Comeau, on a perdu 1000 électeurs dans les quatre dernières années. Il faut regagner des électeurs, il faut regagner des citoyens, car on va payer avec plus de monde les services qu’on a. Si on a plus de monde, ça va nous couter moins cher chacun. Je crois vraiment que Baie-Comeau et la Manicouagan, on ne réussit pas à aller chercher la part de l’argent qui nous revient. Québec nous écoute pas. Il se peut qu’on n’aille pas assez là-bas, qu’on ne les tanne pas assez. Si au Saguenay-Lac-Saint-Jean, ils ont eu leur autoroute, c’est parce qu’ils étaient tannants, ils étaient vraiment tannants! Il faut être un maire présent à Baie-Comeau, mais il faut être tannant à Québec aussi.

Comment voyez-vous Baie-Comeau dans 20 ans?

Baie-Comeau sera reconnue comme une ville nature, plein air et aventure avec un créneau bien ciblé. Qu’est-ce qu’on reconnait du Lac Saint-Jean-Jean? C’est le bleuet. Qu’est-ce qu’on reconnait de Matane? Des crevettes. À Baie-Comeau, on a une richesse extraordinaire : on est né de la forêt boréale. Nous, à Baie-Comeau, on a une nature extraordinaire, c’est ça notre créneau et il faut le mettre clairement. Dans 20 ans, oui, le Drakkar est là pour rester, car c’est une source de fierté de ce que nous sommes à Baie-Comeau. C’est pareil pour la culture, même si on développe un créneau nature, plein air, aventure.

Dans quel créneau peut se distinguer Baie-Comeau?

(Voir réponse plus haut)

En-dehors de la politique, qu’est-ce qui vous allume?

Tout le secteur culturel. Je suis une personne qui consomme de la culture.

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