Regarder travailler un employé municipal, est-ce du harcèlement?

Par Steeve Paradis 5:00 PM - 16 avril 2021
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Les élus de Godbout ont adopté une résolution interdisant aux citoyens d’harceler les employés municipaux. Tous n’ont cependant pas la même définition de ce qu’est du harcèlement. Photo Tourisme Côte-Nord

Peut-on se stationner à côté d’un employé municipal et le regarder travailler? Si certains citoyens de Godbout pensent que oui, le conseil municipal de l’endroit est d’un tout autre avis. Les élus ont d’ailleurs cru bon d’adopter une résolution visant à prévenir le « harcèlement » du personnel de la municipalité.

Selon le maire Jean-Yves Bouffard, la directrice générale de la localité a constaté au cours des derniers jours que des citoyens suivaient de près les employés municipaux dans l’exercice de leurs fonctions, un manège que ces derniers n’apprécieraient guère.

Dans sa résolution adoptée lors de la séance de lundi, à laquelle Le Manic a assisté, le conseil municipal fait valoir que « les récents événements s’apparentent à du harcèlement et de l’acharnement et que cette situation doit cesser sans délai », peut-on lire.

La résolution cite la Loi sur les normes du travail, qui mentionne notamment que « tout salarié a droit à un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique » et également que « l’employeur doit prendre les moyens raisonnables pour prévenir le harcèlement psychologique et, lorsqu’une telle conduite est portée à sa connaissance, pour la faire cesser ».

« Il y en a qui suivent nos employés pas à pas et on considère ça comme du harcèlement », de lancer le maire en entrevue. L’un de ces citoyens visés par la résolution, l’ex-maire Alain Labrie, confirme qu’il a les employés à l’oeil.

Un passe-temps

« On est tous du monde qui se promène dans le village. S’il y a du monde qui travaille, on va se stationner et on va le regarder travailler. Ça nous fait un passe-temps », déclare-t-il tout de go. « Mais on ne va jamais leur parler. On ne dit jamais un mot, on ne fait que regarder ce qui se passe », ajoute-t-il.

« On a tout le temps fait ça et ce n’est pas aujourd’hui que je vais arrêter », d’enchaîner M. Labrie. « Des menaces, on n’en fait pas. Du harcèlement, on n’en a jamais fait parce qu’on ne leur a jamais parlé. On a le droit de regarder qui on veut, on est libres. »

Alain Labrie confie également avoir photographié les deux employés municipaux « à se pogner le beigne », pour démontrer qu’à ses yeux, il y a assez d’un employé municipal. Deux, c’est trop selon lui.

« Nous autres, on paye pour ça », a-t-il clamé en entrevue avec Le Manic au terme de la séance du conseil. « On a tous les droits parce que c’est avec notre argent qu’on les paie. On a le droit de savoir où notre argent va. »

Pour l’instant, la résolution du conseil municipal ne prévoit pas de sanction aux « contrevenants ». Une copie de la résolution sera plutôt remise « à toute personne qui ne respectera pas la présente résolution ».

La campagne électorale se prépare

En fait, cette séance du conseil s’est révélée être, au sein du public réuni dans la distanciation physique à l’école Mgr-Labrie, un prélude à la prochaine campagne électorale.

Alain Labrie ne cache d’ailleurs pas ses ambitions de retourner siéger comme maire de la localité de 250 âmes. « Des citoyens m’ont approché pour que je me représente », a-t-il déclaré en ajoutant que le maire Bouffard a « un manque total de respect pour les citoyens ».

D’autres intervenants ont également apostrophé le maire, arguant entre autres que le conseil était dans l’illégalité dans l’embauche d’un employé. Autant le maire que la directrice générale ont assuré que le tout s’est fait dans les règles de l’art et que ceux qui en doutaient n’avaient qu’à déposer une plainte en bonne et due forme auprès des autorités compétentes en la matière.

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