Honorer la mémoire des bâtisseurs

Par Raphaël Hovington 6:00 AM - 7 octobre 2022
Temps de lecture :

Notre chroniqueur se réjouit de la création de la place qui rend hommage à Mgr Napoléon-Alexandre Labrie.

La Ville de Baie-Comeau mérite d’être citée en exemple pour les gestes qu’elle pose en vue d’honorer la mémoire de bâtisseurs et de personnes sans qui de grands pans de sa personnalité resteraient à développer, bien à l’ombre, dénués d’intérêt.

La liste des contributeurs au milieu de vie que nous connaissons aujourd’hui à Baie-Comeau est longue, voire très longue. Mais le conseil municipal vient d’en distinguer trois d’entre eux afin qu’on se souvienne de leurs réalisations. D’abord, l’évêque fondateur du diocèse du Golfe du Saint-Laurent, l’actuel diocèse de Baie-Comeau, Mgr Napoléon-Alexandre Labrie, en lui dédiant une place sur la rue Conan, une rue ainsi nommée en l’honneur d’un père eudiste qui s’est noyé dans la rivière Rapide à Sept-Îles.

En plus de reconnaître indirectement la vocation missionnaire de Mgr Labrie, la Ville de Baie-Comeau souligne l’œuvre d’un bâtisseur et d’un visionnaire. En 1948, il a signé une lettre pastorale sur la forêt qui a fait grand bruit à l’époque et qui continue aujourd’hui d’inspirer tous ceux qui se préoccupent du sort réservé à la forêt boréale. La Côte-Nord souffrait d’un complexe d’inimitié envers les arbres alors qu’elle aurait dû, comme d’autres régions du Québec, se soucier de les protéger pour s’assurer d’une stabilité économique comme cela existe en Suède ou en Norvège.

Mgr Labrie fut le premier à avoir le courage de reconnaître que la vocation de la Côte-Nord n’était pas liée à l’agriculture mais à ses richesses naturelles, l’eau, la forêt et les mines, qu’il fallait absolument exploiter avec intelligence au profit de sa population et non de spéculateurs venus d’ailleurs ou de régions dont les convoitises visaient à assurer leur avenir, pas nécessairement celle de la Côte-Nord.

Après avoir fondé Hauterive et y avoir installé ses œuvres, le collège, une école normale, l’évêché et, surtout, l’hôpital, Mgr Labrie peut être comparé à un autre grand bâtisseur et visionnaire, le colonel Robert McCormick. Ces deux hommes ont tout mis en œuvre pour assurer l’avenir de Baie-Comeau. À preuve, l’hôpital et le cégep demeurent de grands employeurs. L’économie du savoir, comme on se plaît à l’appeler, en est une aux perspectives illimitées. Il ne nous manque qu’une université

Deux femmes à l’honneur

Cet été, la Ville a donné suite à une recommandation de Marie Amiot et désigné la salle de réunion de la bibliothèque Alice Lane du nom de Thérèse-Fortin-Allaire. Si mon ancienne voisine était toujours de ce monde, elle en serait honorée. Mme Allaire a assisté à l’inauguration du moulin de papier en 1938. Elle a côtoyé Alice Lane à la bibliothèque et s’est illustrée sur les planches du Petit théâtre avec Dorila Verette-Baron (la rue Baron honore sa mémoire).

Elle fut aussi archiviste de la Société historique et première femme à y occuper le poste de vice-présidente. Pour mesurer l’impact qu’elle a pu avoir sur les jeunes, parlez-en à Alain Aubé. Ce dernier se réfugiait à la bibliothèque pour lire des bandes dessinées tandis que Mme Allaire l’incitait à découvrir les grands classiques de la littérature.

Puis la dernière personne à être honorée la semaine dernière est fort respectée dans le monde de l’artisanat. Le parc des arts maritimes a été rebaptisé du nom de Parc Anita-Julien-Paquet et inauguré en présence de trois de ses filles, Jovette, Martine et Danielle.

Le conseiller municipal Sébastien Langlois a décrit les principales réalisations d’Anita Julien-Paquet, entre autres, la création des Artisans Manicouagan. Pourquoi ce regroupement? Pour promouvoir les métiers d’art et permettre aux créateurs, ces travailleurs solitaires, mais devenus solidaires, de mieux vivre de leur art.

Tout comme il faut saluer la persévérance du Grand Rappel dans la désignation de la Place Mgr-Labrie, il est important de mentionner celle de Group’Art dans la démarche visant à reconnaître l’exceptionnel travail s’étalant sur une trentaine d’années de Mme Julien-Paquet.

Elle a quitté Baie-Comeau en 1989, mais son cœur est certainement resté très attaché à une ville qui compte parmi ses bâtisseurs, son père Homer. Au nombre de ses réalisations, la publication d’un opuscule sur le Parc de la grotte. Elle a bien connu Sœur St-Jean Apôtre, à qui elle a ainsi rendu un vibrant hommage.

Je vous invite à faire comme eux et à devenir des chasseurs d’histoire parce c’est en regardant le passé qu’on anticipe l’avenir.

Partager cet article