Les achats de produits sanitaires sous panique doivent être évités, selon une étude

Par Philémon La Frenière-Prémont, La Presse Canadienne 10:53 AM - 12 mai 2024
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Des bouteilles de désinfectant pour mains Purell sont exposées tandis qu’un travailleur remplit des étagères dans une épicerie Dahl’s, le mercredi 29 avril 2009, à des Moines, Iowa. Photo AP/Charlie Neibergall

Le gouvernement et les commerces doivent décourager les achats dictés par la panique lors de pandémies ou de catastrophes, d’après une étude menée par une chercheuse de l’Université Concordia. 

Xiaodan Pan, professeure agrégée au Département de gestion de la chaîne d’approvisionnement et des technologies d’affaires de l’Université Concordia, a analysé des données sur une période de près de dix ans à propos des achats de désinfectants pour mains aux États-Unis.

La chercheuse a concentré ses recherches sur la pandémie de grippe A (H1N1).

D’après les résultats de sa recherche, les mouvements de panique qui mènent la population à se ruer sur ce type de produits lors des pandémies devraient être évités. «Nous devons faire confiance en notre système moderne de chaîne d’approvisionnement», a-t-elle dit en entrevue à La Presse Canadienne.

Mme Pan, ainsi que Martin Dresner, de l’Université du Maryland, Guang Li, de l’Université Queen’s, et Benny Mantin, de l’Université du Luxembourg, ont déterminé qu’il était avantageux d’être mieux préparé à une possible crise sanitaire ou une catastrophe naturelle que de compenser en allant acheter impulsivement une grande quantité de produits sanitaires.

«Les données montrent que l’offre et la demande concernant le désinfectant pour main se sont rapidement équilibrées, particulièrement lors de la deuxième vague de la pandémie [de grippe A]», a affirmé Mme Pan. Cet équilibre a été atteint même si les ventes de désinfectants pour mains avaient augmenté de 250% dans les deux premières semaines suivant le début de la pandémie en raison des achats dictés par la panique.

En raison de cet équilibrage rapide, le prix des désinfectants n’a presque pas fluctué, augmentant en moyenne de 2%, dit la chercheuse, en dessous de l’inflation pour l’année 2009 aux États-Unis (2,7%). Puisque les détaillants s’habituent rapidement à la forte demande, les magasins sont rapidement rééquipés en produits sanitaires, donc pas besoin de courir pour aller en chercher, explique Mme Pan. 

Les grands formats de désinfectants ayant été très populaires pendant la pandémie, il y a même eu une baisse de prix pour les plus petits formats.

En même temps, les détaillants veulent préserver leur réputation. Une augmentation forte des prix d’un produit essentiel en pleine crise sanitaire serait très mal vue, dit Mme Tam.

Lors de la deuxième vague de grippe A, les commerçants, mieux préparés, se sont ajustés encore plus vite à l’augmentation de la demande. Encore là, les prix ont peu fluctué.

«Les consommateurs, soyez patients. Évitez les achats dictés par la panique. Vous pouvez accumuler des produits au préalable, mais évitez les achats dictés par la panique.»

Cette analyse peut aussi être appliquée à d’autres produits sanitaires, comme le papier de toilette, a lancé Mme Pan.

Des ressemblances avec la COVID-19

Le comportement des consommateurs par rapport au désinfectant pour mains a été très similaire pendant la pandémie de COVID-19, mais dans une plus grande proportion, ce virus étant plus contagieux. 

«Nous avons comparé les modèles des deux pandémies. Pour la consommation de produits sanitaire, c’est très similaire.»

La vente de désinfectant pour les mains avait aussi fortement augmenté lors de la pandémie de COVID-19 de 792% lors de la première semaine de la pandémie par rapport à la même semaine de l’année précédente, d’après les données de Statistique Canada. 

Toutefois, «nous ne devrions pas blâmer ceux qui font des achats dictés par la panique», mais plutôt encourager l’accumulation des biens sanitaires au préalable d’une pandémie, d’après Mme Pan. Cela doit passer par une meilleure éducation sur le sujet, indique-t-elle, où tant le gouvernement que les détaillants ont un rôle à jouer.

La professeure agrégée a eu cette idée de recherche après le début de la pandémie de COVID-19. Or, il n’y avait pas assez de données de disponibles pour mener une étude sur cette pandémie. «Alors nous nous sommes dit, pourquoi ne pas regarder en arrière?», relate Mme Pan.

La chercheuse et ses collègues se sont donc penchés sur la pandémie de grippe A.

Ils ont analysé des données hebdomadaires sur la vente de désinfectant pour les mains dans 38 000 commerces aux États-Unis entre 2008 et 2017. 

En 2012, une étude publiée dans la revue médicale The Lancet avait estimé que la pandémie de grippe A avait fait entre 151 700 et 575 400 morts.

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