Une maison de guérison et une école traditionnelle pour les Innus

Par Jacob Buisson 4:00 PM - 19 août 2024 Initiative de journalisme local
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Manishan Kapesh au Centre des Premières Nations Nikanite de l’Université du Québec à Chicoutimi. Photo Denis Blackburn

À 74 ans, la fondatrice du Centre Kutikuniu, situé à Moisie, a encore des projets pour le futur. Elle aimerait créer un programme d’éducation sur les savoirs ancestraux, pour les jeunes Innus. Elle appellerait ça « l’INNUversité ».

« Les gens qui viennent ici [au Centre Kutikuniu], ils sont au courant de leur culture, mais ils sont juste au courant, il faut la vivre aussi », relève Manishan Kapesh, directrice et fondatrice du Centre Kutikuniu et originaire de Mani-utenam. « Ce que moi j’ai vécu, ce que j’enseigne ici, il faut le faire vivre et retourner [dans la forêt] ».

Ce n’est pas le premier projet de la septuagénaire. Il y a plus de 23 ans, elle était en manque de sa culture. Plutôt que d’attendre que quelqu’un d’autre agisse, elle a décidé de créer un centre de reconnexion culturelle. « Il faut que je risque, que j’ose. Si personne n’ose, moi j’ose », souligne Manishan Kapesh.

Mme Kapesh est née dans le territoire et ses parents y ont vécu une bonne partie de leur vie. Mais, ayant vécu dans un pensionnat pendant neuf ans, elle a été coupée de sa culture innue.

« La Nation était en train d’être tuée par les gouvernements qui lui imposaient toutes sortes d’affaires qui ne font pas à eux. Comment veux-tu que ça fasse à nous autres ? », exprime-t-elle.

Afin d’aider les personnes qui ont développé des problèmes à cause de ce manque de culture, avant d’avoir son centre, elle accueillait d’abord ces gens chez elle, à Mani-utenam. Mme Kapesh met de l’avant la culture que son père et ses oncles lui ont transmise.

Les personnes qui lui rendent visite sont souvent aux prises avec des dépendances, ou des traumatismes. 

À un moment, il y a eu trop de demandes et elle a senti le besoin d’agrandir son espace de travail, pour accueillir plus de personnes.

« Les gens avaient faim de ça. Ça se garroche, même encore aujourd’hui », mentionne la fondatrice du centre Kutikuniu. Son choix d’emplacement s’est fixé sur l’ancienne base militaire de Moisie. 

Au départ, elle avait peu d’argent et ne réussissait pas à contracter un prêt. Heureusement pour Mme Kapesh et ses usagers, un employé de la Société canadienne d’hypothèque et de logement (SCHL) a décidé de croire au projet et il s’en est porté garant en 2002.

Manishan Kapesh peut accueillir jusqu’à 17 individus. À ses débuts, c’était les gens de son âge qui venaient se ressourcer. Les séjours étaient alors de deux semaines. 

Maintenant, ce sont les jeunes de 18 à 30 ans qui réclament ses services. Et les séjours ont raccourci. « Ils élèvent leurs enfants, ils travaillent, donc ils ont besoin de quatre jours intensifs », explique Mme Kapesh.