Ottawa songe à exempter Hydro-Québec du décret de protection du caribou

Par Michel Saba, La Presse Canadienne 11:31 AM - 30 août 2024
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Le gouvernement fédéral envisage d’exempter les installations et les projets d’Hydro-Québec de son décret de protection du caribou forestier en vertu de la Loi sur les espèces en péril. Le ministre fédéral de l’Environnement, Steven Guilbeault, en conférence de presse à Ottawa, le mercredi 26 juin 2024. LA PRESSE CANADIENNE/Spencer Colby

Le gouvernement fédéral envisage d’exempter les installations et les projets d’Hydro-Québec de son décret de protection du caribou forestier en vertu de la Loi sur les espèces en péril.

«C’est fort probable», a confirmé vendredi à La Presse Canadienne Kaitlin Power, l’attachée de presse du ministre de l’Environnement et du Changement climatique, Steven Guilbeault, confirmant ainsi une information d’abord rapportée par Radio-Canada.

Dans une déclaration écrite, le ministre Guilbeault justifie que le gouvernement prend «des décisions conséquentes avec (l’) objectif» de rendre le secteur énergétique canadien carboneutre d’ici 2035.

«Il est bon de rappeler que l’évaluation d’Environnement Canada sur les menaces imminentes au caribou a identifié l’exploitation forestière et la prolifération de chemin forestier qui fragmentent l’habitat comme les facteurs de risque principaux, et non le secteur énergétique», note-t-il au passage.

La nouvelle arrive au moment où le comité de l’environnement et du développement durable continue d’entendre différents intervenants, dont des groupes de protection de la nature, une scierie et une Première Nation, se prononcer sur le décret.

Le Bloc québécois entend profiter de la rencontre pour présenter une motion visant ce qu’une réunion soit ajoutée pour «étudier les effets potentiels que présente un décret d’urgence sur le déploiement de projets d’énergie propre et sur les infrastructures nécessaires au bon fonctionnement de ces réseaux».

Le député de Jonquière et porte-parole bloquiste en matière de Ressources naturelles et Énergie, Mario Simard, qui doit déposer la motion, plaide pour «une approche globale et intégrée».

Il y écrit que «la protection de toute espèce menacée est intimement liée à la protection de l’environnement ainsi qu’à la capacité de mettre de l’avant des stratégies vertes de remplacement des énergies fossiles par des projets d’énergie propre comme l’éolien, la biomasse et l’hydroélectricité».

La population de caribous est en déclin au Québec depuis plusieurs années et l’exploitation forestière est la principale cause de cette précarité, en raison notamment des chemins forestiers qui détruisent l’habitat et favorisent le déplacement des prédateurs naturels du caribou comme l’ours et le loup.

Devant les élus fédéraux, lundi, une mairesse de la Côte-Nord a estimé qu’un décret pour protéger le caribou équivaudrait à un «drame» pour l’économie de sa communauté.

À l’inverse, le chef de l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador Ghislain Picard y a plutôt vu une mesure nécessaire pour assurer la survie de hardes menacées. Tout comme un autre chef autochtone, il a mentionné que la relation entre les peuples autochtones et le caribou est une question d’identité.

Malgré une succession d’annonces pour protéger l’espèce, Québec n’a pas présenté de stratégie de protection pour toutes les populations de caribou qui permettrait d’atteindre l’objectif prévu dans une entente avec Ottawa.

Une consultation sur le projet de décret d’Ottawa est en cours jusqu’au 15 septembre et doit mener à la version finale.

Le gouvernement de François Legault a décidé de ne pas participer à la consultation. Il estime que ses propres mesures de protection de l’espèce en déclin portent ses fruits.

À ce sujet, l’attachée de presse du ministre a affirmé qu’Hydro-Québec «commence» à participer aux consultations, ce qui permet de prendre en compte ses projets, et que jusqu’à présent le Québec refusait de fournir ses cartes.

Selon les calculs du gouvernement provincial, la décision d’Ottawa engendrera la perte d’«un minimum» de 2000 emplois dans les zones actuellement projetées.